Selon une étude la RDC incapable de prendre la relève de la MONUSCO

La République Démocratique du Congo (RDC) est dans l’incapacité de prendre la relève de la MONUSCO dans l’Est du pays, selon une étude commanditée par le Réseau Africain du Secteur de Sécurité (ASSN) en partenariat avec le Réseau pour la Réforme du Secteur de Sécurité et de la Justice (RRSSJ) et présentée ce mercredi 12 juin 2024 à Kinshasa.

Cette recherche portant sur le retrait de la MONUSCO en RDC : enjeux et perspectives, a été menée par 3 chercheurs congolais, dont deux juristes publicistes internationalistes, le professeur Balingene Kahombo et le doctorant Joseph Cihunda Hengelela, ainsi que le philosophe et criminologue spécialiste en sécurité intérieure, Jean-Rene Mabwilo.

En réalité, cette étude est une évaluation critique du processus de désengagement définitif de la MONUSCO du territoire congolais, tel qu’il ressort des documents stratégiques élaborés par les Nations Unies et la RDC à cet effet.

Ces documents comprennent la Stratégie commune sur le retrait progressif et échelonné de la MONUSCO d’octobre 2020, le Plan conjoint de transition pour le retrait de la mission de septembre 2021, assorti d’une feuille de route (2021-2024), et le Plan de transition révisé de novembre 2023, intitulé « Note sur le retrait accéléré, progressif, ordonné et responsable de la MONUSCO de la RDC : plan et calendrier de désengagement complet ».

Les enquêteurs avancent plusieurs raisons pour expliquer l’incapacité des autorités congolaises à prendre le relais de la MONUSCO, la plus importante étant la déstructuration de ses forces de défense et de sécurité ainsi qu’un appareil de justice inefficace, dont la réforme n’a pas encore été couronnée de succès. Ils notent également la légitimation des groupes armés sous le vocable de « Wazalendo » (résistants) au lieu de les désarmer et de démobiliser leurs membres.

Selon cette étude, aucun des préalables ou conditions minimales au retrait de la MONUSCO, définis dans le plan de transition révisé de novembre 2023, n’est rempli à ce jour.

Ces préalables incluent la réduction significative des menaces des groupes armés, le renforcement de la capacité à protéger les civils et résoudre les conflits interethniques, la mise en œuvre du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (P-DDRCS), ainsi que l’organisation d’élections crédibles, transparentes, inclusives et pacifiques dans les délais constitutionnels.

Les données recueillies et analysées montrent que le gouvernement congolais n’a pas encore fait les progrès escomptés pour rassurer sur sa capacité à prendre la relève des contingents onusiens, surtout dans les zones à haut risque ou affectées par des conflits dans les provinces du Sud-Kivu, du Nord-Kivu et de l’Ituri.

Les acquis de la transition vers le désengagement complet de la mission ne sont pas non plus bien préservés faute d’entretien des bases et équipements transférés à l’État congolais et de la prise en charge effective des agents de sécurité qui les exploitent.

À part l’incapacité des autorités congolaises à prendre le relais de la MONUSCO, les chercheurs ont relevé un autre constat : la nécessité de mettre en œuvre la réforme et d’améliorer la gouvernance du secteur de la sécurité.

Un autre défi est d’assurer la bonne gestion par le gouvernement congolais des acquis de la transition vers le désengagement onusien complet.

La prolongation du mandat de la MONUSCO pour une année, l’une des pistes de solution, cette étude formule plusieurs recommandations.

Il s’agit, entre autres, de l’amélioration de la gouvernance sécuritaire, en commençant par l’accélération de la réforme de l’armée, de la police et de la justice. Cette recherche recommande également la relance du dialogue politique avec tous les groupes armés, ce qui permettra, à son tour, la bonne exécution du P-DDRCS et la réduction des conflits ethniques.

D’autres recommandations se rapportent à la levée de l’état de siège et au rétablissement dans leurs fonctions des autorités civiles élues dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri ainsi qu’à la nécessité de renforcer la coopération bilatérale et régionale en matière de sécurité.

Quant à l’option du désengagement complet de la MONUSCO, cette étude déconseille de se fier à un calendrier incompressible pour ne pas laisser un chaos sécuritaire en RDC. L’ONU et le gouvernement congolais sont donc appelés à accepter au moins la prolongation du mandat de cette mission dans les trois provinces de l’Est du pays (Nord-Kivu, Sud-Kivu et Ituri) pour une période supplémentaire d’une année, soit en 2025.

À défaut d’adopter cette solution flexible, et pour éviter l’erreur commise lors du retrait de l’Opération des Nations Unies au Congo (ONUC) en 1964, lequel avait culminé avec l’embrasement total du pays, il faudrait envisager la conclusion d’un accord de poursuite de partenariat permettant non seulement les opérations civiles post-retrait de la MONUSCO, mais aussi la coopération militaro-sécuritaire pour continuer à assister la RDC dans la restauration de la paix et le maintien de l’ordre public sur son territoire.

Cette étude a été réalisée dans le cadre du programme Just Future (JF). Les recherches et enquêtes de terrain ont été menées dans les villes de Kinshasa, Goma et Bukavu du 26 février au 31 mars 2024.

CN

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